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À la Fabrique nomade, les artisans réfugiés renouent avec leur art

Novembre 2024 1bis avenue Daumesnil, Paris 12

À la Fabrique nomade, les artisans réfugiés renouent avec leur art

Lorsqu’ils quittent leur pays d’origine, nombre d’exilés laissent tout ou presque derrière eux. Y compris des savoir-faire remarquables, comme en ont les artisans d’art. Freinés par la barrière de la langue, une perte de confiance en soi et pris dans l’urgence de devoir stabiliser à minima leur situation, beaucoup acceptent des emplois précaires et non qualifiés dans les secteurs sous tension vers lesquels on les oriente systématiquement à leur arrivée en France.

« Un véritable gâchis de compétences », regrette Inès Mesmar, qui a décidé d’agir. En janvier 2016, elle a ouvert la Fabrique Nomade, une association qui œuvre pour l’insertion professionnelle de ces artisans réfugiés.

CDD d’insertion, parcours certifiant au Viaduc des arts

Ils sont afghans, iraniens, sénégalais, kurdes, tunisiens, chinois, vénézuéliens ou encore russes et ont en commun d’être des artisans d’art aux savoir-faire exceptionnels, reconnus dans leur pays d’origine. Mais pour valoriser ce talent et éviter qu’il ne se perde avec leur migration, un passage par la Fabrique Nomade est souvent bienvenu.

« Ici, nous leur proposons un CDD d’insertion de dix mois au cours desquels ils pourront suivre un parcours unique, combinant formation, cours de français et mise en pratique professionnelle en atelier puisque nous travaillons sur de vrais projets professionnels, pour des clients et nos propres collections », explique Inès Mesmar, fondatrice de l’association. Au terme de ces dix mois, les artisans passent devant un jury pour valider ce parcours certifiant, et ensuite accéder plus facilement à des emplois en lien avec leur artisanat.

Aujourd’hui, trois métiers sont accompagnés par la Fabrique Nomade : la couture, la broderie et la bijouterie. « Au début, nous accompagnions 22 métiers, de la vannerie au travail du verre en passant par le métal et bien d'autres », reprend Inès Mesmar. « Mais nous avons décidé de nous concentrer sur ceux qui étaient les plus représentés et les plus en lien avec la dynamique du marché. »

Transformateur de vie

Pour Inès Mesmar, créer un espace de création et de formation pour les artisans d’art exilés s’est imposé comme une nécessité, en 2015. « J’ai découvert dans les armoires de ma mère de merveilleuses broderies qu’elle avait réalisées », raconte-t-elle. « J’apprenais donc, à l’âge de 35 ans, que ma mère avait été une talentueuse brodeuse dans son pays. Pourtant, elle n’avait jamais parlé de son métier. J’étais indignée de constater qu’elle n’avait malheureusement pas réussi à trouver sa place professionnellement, ni les ressources pour valoriser son savoir-faire en France. »

À cette époque, l’Europe est en plein pic de la crise migratoire. Inès traverse quotidiennement des campements de réfugiés qui se sont installés à Paris et alentour. « J’avais l’intuition que, comme ma mère, il y avait parmi toutes ces personnes d’autres artisans aux compétences insoupçonnées. J’ai donc transformé mon indignation en action et créé la Fabrique Nomade », poursuit Inès Mesmar.

Depuis 2016, une centaine de personnes sont passées par l’association qui continue, encore aujourd’hui, de suivre leur parcours. « Environ 80 % ont trouvé un emploi salarié à l’issu du programme », assure la fondatrice, qui explique : « Certains se sont mis à leur compte, mais plus par nécessité car c’est leur secteur qui l’exige. Généralement, ces artisans recherchent plutôt des postes salariés, synonymes de stabilité ».

C'était le cas de Katayon, âgée d’une cinquantaine d’années lorsqu’elle a quitté son pays, l’Iran, pour la France. « Après un parcours de vie cabossé, cette couturière aux nombreuses années d’expérience a tout donné. Et à la fin de son parcours à la Fabrique Nomade, elle a été recrutée en CDD puis en CDI chez Dior. C’est une vraie battante, et désormais, une femme accomplie et métamorphosée », se réjouit Inès Mesmar.

Des histoires comme celle de Katayon, Inès Mesmar en a plein. Et pour chacune, une issue inspirante, transformatrice de vies. « Dans leur migration, beaucoup de personnes perdent confiance en elles et, même, un peu de ce qu’elles sont. En mettant en lumière leur talent, nous montrons non seulement une autre vision de la migration, mais nous aidons ces personnes à se sentir pleinement intégrée dans la société. Les réfugiés ne sont plus une masse indifférenciée de personnes mais des talents qui ont beaucoup de choses à apporter », résume Inès Mesmar.

Au cœur de l’artisanat d’art

Installée au Viaduc des Arts depuis 2018, la Fabrique Nomade occupe deux voûtes. L’une abrite au rez-de-chaussée l’atelier broderie et l’atelier bijouterie, l’atelier couture se trouvant au sous-sol, l’autre propose une salle de formation, un espace cuisine et les bureaux de l’association.

« Faire partie de ce lieu, qui est le symbole de l’artisanat d’art parisien, c’est formidable. La symbolique est très forte : cela signifie, quelque part, que nous donnons la même place à nos artisans. C’est donc, déjà, les intégrer au sein de ce secteur et de l’écosystème qui est ici représenté », se félicite Inès Mesmar.

La Fabrique nomade
1bis avenue Daumesnil, Paris 12
lafabriquenomade.com
© Photo : Nicolas Scordia

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